CLIMATOLOGIE

dimanche 29 mars 2020

Plus forte pression tous mois confondus dans les îles Britanniques depuis 1926 !

Après l’Islande la veille, les îles Britanniques ont enregistré des pressions historiquement élevées pour un mois de mars le dimanche 29 mars 2020. La pression au cœur du puissant anticyclone centré au sud de l’Islande s’est renforcée pour atteindre 1055 hPa le 29 matin (selon le Met Office). Pour trouver des pressions plus élevées sur le proche Atlantique, il faut remonter au 28-29 janvier 2003 (1057,2 hPa le 28 janvier à 12h UTC selon la réanalyse ERA-Interim).


Les plus fortes pressions ont été relevées par 3 bouées marines situées au large des côtes nord-occidentales britanniques : 1052,6 hPa le 29 mars à la bouée K5 (à 2h et 3h du matin) au large des côtes écossaises, 1052,6 hPa à la bouée K4 (à 13h) et 1051,9 hPa à la bouée M4 (à 12h) au large des côtes irlandaises.

Source : archives du Met Office
Au Royaume-Uni, la pression (réduite au niveau de la mer) a dépassé les 1050 hPa en de nombreux endroits, de l’Écosse à l’Irlande du Nord. On a relevé le dimanche 29 mars jusqu’à 1051,2 hPa à South Uist Range et 1051,1 hPa sur l’île Tiree en Écosse, jusqu’à 1051,0 hPa à Magilligan et 1050,5 hPa à Ballypatrick Forest en Irlande du Nord. La plus haute pression pour un mois de mars au Royaume-Uni et dans les îles Britanniques plus généralement était officiellement de 1048,6 hPa le 9 mars 1953 à Tynemouth (Angleterre). Toutefois, cette valeur paraît suspecte au regard des archives météorologiques consultées (cf. document ci-contre) et relèverait plutôt d’une erreur de transcription (la valeur exacte serait en réalité de 1043,6 hPa ce jour-là). Le précédent record le plus fiable serait ainsi de 1047,9 hPa le 3 mars 1990 à St Mary’s Airport (îles Scilly, en mer Celtique). Quoi qu’il en soit, le précédent record mensuel de haute pression pour les îles Britanniques a donc été pulvérisé ce dimanche 29 mars !

En outre, il faut remonter au 24 décembre 1926 pour trouver une pression plus élevée dans les îles Britanniques, avec 1051,9 hPa à Wick (Écosse), le record absolu étant toujours détenu par Aberdeen (Écosse) avec 1053,6 hPa le 31 janvier 1902.

En Irlande, on a relevé le dimanche 29 mars jusqu’à 1051,3 hPa à Malin Head (à 12h), pulvérisant ainsi le record mensuel national (précédent record : 1047,1 hPa le 13 mars 1900 à l’observatoire de Valentia dans le comté de Kerry). Pour trouver des pressions supérieures en Irlande tous mois confondus, il faut même remonter au 28 janvier 1905, date à laquelle l’observatoire de Valentia dans le comté de Kerry a établi le record national avec 1051,9 hPa.

Par ailleurs, notons que c’est la 2e fois cette année que la pression dépasse la barre des 1050 hPa dans les îles Britanniques : pour mémoire, la pression en surface a atteint et dépassé les 1050 hPa dans un grand nombre de stations du sud de l’Angleterre les 19 et 20 janvier dernier, établissant à cette occasion la plus haute pression tous mois confondus pour les îles Britanniques depuis le 16 janvier 1957.
Selon le spécialiste Stephen Burt, on ne comptabilisait avant 2020 que 9 autres événements comparables depuis 1800 au cours desquels des pressions supérieures ou égales à 1050 hPa ont été observées dans les îles Britanniques, ce qui souligne le caractère exceptionnel de ce début d’année 2020.

samedi 28 mars 2020

Record de haute pression en Islande pour un mois de mars depuis 1883 !

Après s’être maintenue en phase positive durant au moins 91 jours consécutifs (soit du 29 décembre 2019 au 28 mars 2020) avec des valeurs d’indice historiquement élevées en février, l’oscillation arctique (AO en anglais) évolue depuis quelques jours vers des conditions plus neutres et semble transiter vers un mode négatif (au moins temporairement).
L’oscillation nord-atlantique (qui constitue une vue régionale de l’oscillation arctique) évolue également vers un mode négatif, après avoir connu une phase positive durant quasiment tout l’hiver 2019-2020, avec de hautes pressions plus marquées des Açores à l’Afrique du Nord et des pressions anormalement basses entre le Groenland et la Scandinavie (en particulier de l’île de Jan Mayen aux îles Féroé, en passant par l’Islande).

Comme prévu il y a quelques jours, un changement s’est opéré dans la dynamique aérologique ce samedi 28 mars avec l’arrivée d’un puissant anticyclone dans l’Atlantique nord-est, centré au sud de l’Islande. La pression a atteint 1050,5 hPa dès la mi-journée à Hjarðarland í Biskupstungum et 1050,4 hPa à Eyrarbakki sur la côte sud-occidentale de l’Islande : il s’agit de la plus haute pression enregistrée en Islande pour un mois de mars depuis 137 ans ! Il faut remonter au 6 mars 1883 pour trouver des pressions plus élevées dans le pays avec 1051,7 hPa à Vestmannaeyjar (îles Vestmann) et 1050,7 hPa à Stykkishólmur. Il faut également remonter à l’année 1962 pour trouver des pressions supérieures à 1048 hPa au mois de mars en Islande (jusqu’à 1048,5 hPa à Galtarviti) et au 16 avril 1991 pour trouver des pressions plus élevées tous mois confondus (1050,8 hPa à Egilsstaðir).
Notons que certaines stations situées au-dessus de 600 m d’altitude ont enregistré des pressions réduites au niveau de la mer encore supérieures (1054,2 hPa à Setur [693 m] et 1054,1 hPa à Veiðivatnahraun [647 m]), mais l’altitude plus élevée de ces stations rend la réduction barométrique au niveau de la mer moins significative et ne permet pas véritablement les comparaisons.

Notons également que la pression a rarement atteint les 1050 hPa en Islande au cours des 200 dernières années, seulement à 8 reprises au 19e siècle et à 5 reprises depuis le début du 20e siècle (les valeurs les plus élevées sont indiquées ci-dessous pour les 13 événements répertoriés) :
  • 1058,5 hPa le 03/01/1841 à Reykjavik [1057,6 hPa le 04/01/1841] ;
  • 1051,8 hPa le 14/02/1892 à Stykkishólmur et à Akureyri ;
  • 1051,7 hPa le 11/12/1846 à Reykjavik ;
  • 1051,6 hPa le 12/01/1890 à Akureyri ;
  • 1051,1 hPa le 14/01/1892 à Vestmannaeyjar (îles Vestmann) ;
  • 1051,7 hPa le 06/03/1883 à Vestmannaeyjar (îles Vestmann) et 1050,7 hPa à Stykkishólmur ;
  • 1050,9 hPa le 23/12/1836 à Reykjavik ;
  • 1050,0 hPa le 26/02/1890 à Stykkishólmur ;
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  • 1054,2 hPa le 16/12/1917 à Stykkishólmur ;
  • 1051,7 hPa le 25/02/1962 à Dalatangi et le 26/02/1962 à Akureyri ;
  • 1051,1 hPa le 17/01/1977 à Galtarviti (Keflavik) ;
  • 1050,8 hPa le 16/04/1991 à Egilsstaðir ;
  • 1050,0 hPa le 24/02/2006 à Dalatangi et à Skjaldþingsstaðir.

Les modèles prévoient des pressions encore plus élevées le dimanche 29 mars au cœur de cet anticyclone, possiblement jusqu’à 1055 hPa. De telles valeurs sont extrêmement rares pour une fin mars sur le proche Atlantique : le record mensuel officiel de haute pression pour les îles Britanniques, vieux de 67 ans (1048,6 hPa* le 09/03/1953 à Tynemouth [Angleterre]), est d’ores et déjà battu ce samedi soir avec 1048,8 hPa à 20h à Stornoway (Écosse). Si la pression atteint 1050 hPa dimanche, ce sera aussi la 2e fois cette année que la pression dépasse la barre des 1050 hPa dans les îles Britanniques : pour mémoire, la pression en surface a atteint et dépassé les 1050 hPa dans un grand nombre de stations du sud de l’Angleterre les 19 et 20 janvier dernier, enregistrant à cette occasion la plus haute pression tous mois confondus pour les îles Britanniques depuis le 16/01/1957.

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* Ce record paraît néanmoins suspect au regard des archives météorologiques consultées et relèverait plutôt d’une erreur de transcription (la valeur exacte serait en réalité de 1043,6 hPa ce jour-là).
Nous préférons retenir ici comme record le plus fiable les 1047,9 hPa du 3 mars 1990 à St Mary’s Airport (îles Scilly, en mer Celtique).

samedi 14 mars 2020

L’Égypte en proie aux colères de Tefnout…

Source : MétéoSuisse et ECMWF
Une puissante dépression s’est formée sur le nord-est de l’Afrique le 12 mars 2020 et a provoqué durant deux jours consécutifs de fortes précipitations en Égypte, en Israël et Cisjordanie, au Liban et en Jordanie, accompagnées de fortes rafales de vent (jusqu’à 130 km/h le 13 mars en Cisjordanie) et d’intenses tempêtes de sable dans le sud de l’Égypte, le nord du Soudan et le nord-est du Tchad. Un minimum dépressionnaire particulièrement creux (994 hPa) et très inhabituel pour cette région du monde s’est positionné au-dessus du delta du Nil le 13 mars, autour duquel se sont enroulées d’imposantes formations nuageuses convectives.


En Égypte, il est tombé 64,7 mm en 2 jours les 12 et 13 mars à l’aéroport du Caire (dont 45,0 mm en 24h, un record), soit l’équivalent de plus de 2 fois la pluviométrie moyenne annuelle (25 mm/an [24,7 mm selon la moyenne 1971-2000 et 26,0 mm selon la moyenne 1961-1990]) et 16 fois la pluviométrie moyenne mensuelle (4 mm) pour la capitale égyptienne !
On a également relevé 43 mm en 24h à Port-Saïd (pour une moyenne annuelle de 83,8 mm et une moyenne mensuelle de 10 mm), 32 mm à El-Dabaa, 28 mm à Alexandrie, 18 mm à Ras Sudr à l’ouest du Sinaï et 12 mm à El‑Tor dans le sud de la péninsule égyptienne.

Les colères de Tefnout (déesse de la pluie dans la mythologie égyptienne, représentée sous la forme d’une femme avec une tête de lionne coiffée d’un disque solaire) ont fait une vingtaine de victimes en Égypte, principalement dans les inondations qui ont touché l’agglomération du Caire.

De fortes pluies se sont produites également plus à l’est dans la vallée du Jourdain, notamment à Gitit (colonie israélienne située en Cisjordanie) où il est tombé 44,0 mm en 2 jours du 12 au 14 mars (matin), dont 28,0 mm en 24h.

samedi 7 mars 2020

Fort contraste pluviométrique en Europe, péjoration pluviométrique au Maghreb

Le mois de février 2020 a ponctué un hiver météorologique 2019-2020 historiquement doux en Europe (notamment en France), marqué aussi par des précipitations fortement excédentaires sur une large moitié nord (en particulier au Royaume-Uni en février) et un déficit pluviométrique remarquable dans le sud de l’Europe, qui a pris un caractère extrême en Espagne et au Maghreb en février.



Le mois de février 2020 a été caractérisé par des anomalies de pression, montrant un fort dipôle entre de basses pressions particulièrement marquées sur le nord de l’Atlantique et de l’Europe (anomalies atteignant -15 à -20 hPa sur le mois) et de hautes pressions particulièrement élevées de l’Atlantique subtropical (Açores) jusqu’à la Méditerranée (anomalies supérieures à +5 hPa). Cette configuration atmosphérique, typique d’une oscillation nord-atlantique en phase positive (corrélée à une phase positive de l’oscillation arctique à plus grande échelle), s’est traduite par des vents d’ouest/sud-ouest persistants et plus forts que la normale sur l’Europe (et d’un courant-jet d’altitude plus fort également) et le passage d’une multitude de perturbations atlantiques à une cadence soutenue (11 épisodes tempétueux sur la France entre début février et début mars !).

Le Royaume-Uni a enregistré son mois de février le plus pluvieux depuis 1862 avec un cumul moyen national de 209,1 mm, battant ainsi le précédent record de février 1990 (193,4 mm). Les anomalies pluviométriques ont atteint plus de 400 % dans le centre du Royaume-Uni ! Même constat en Irlande où les cumuls pluviométriques ont été 1,5 à 3,3 fois supérieurs à la normale mensuelle, la plupart des stations synoptiques (principalement dans la moitié nord du pays) ayant enregistré leur mois de février le plus pluvieux (comme à Malin Head depuis le début des mesures en 1850).
En raison de la persistance sur l’Europe de l’Ouest d’un flux océanique doux et très perturbé durant tout l’hiver et en février en particulier, l’indice d’humidité des sols au début du mois de mars témoigne de sols saturés sur de nombreuses régions françaises, en dehors du Sud-Est davantage protégé par les hautes pressions.

Plus au sud, le contraste pluviométrique est saisissant : la persistance de hautes pressions sur l’Espagne et le Maghreb durant l’hiver a entraîné un déficit pluviométrique significatif qui s’est fortement aggravé en février. Si le Portugal et l’Espagne ont connu leur mois de février le plus chaud depuis le début des mesures, le déficit pluviométrique a également atteint un niveau tout à fait exceptionnel dans la péninsule Ibérique (mois de février le plus sec en Espagne et 5e mois de février le plus sec au Portugal depuis plus de 80 ans).

Le déficit pluviométrique observé sur tout le pourtour de la Méditerranée occidentale a revêtu un caractère extrême dans tout le Maghreb au mois de février. Après une année 2019 déjà anormalement déficitaire, le Maroc a connu un hiver 2019-2020 particulièrement sec : il n’est tombé notamment qu’un peu plus de 140 mm à Tanger (dans l’extrême nord du pays, généralement plus arrosé que le reste du pays), soit près de 40 % seulement de la moyenne saisonnière.
En février, il n’a quasiment pas plu une goutte sur tout le Maghreb (≤ 1 mm à Rabat, Casablanca, Marrakech, Oran, Alger, Constantine, Tunis…). Même à Tanger, il n’est tombé que 3,7 mm en février, soit moins de 4 % de la moyenne mensuelle. À Ceuta (enclave espagnole sur la côte nord de l’Afrique, dans le détroit de Gibraltar), le cumul mensuel ne s’élève qu’à 0,4 mm, une situation qui tranche radicalement avec le mois de février 2010 exceptionnellement pluvieux (347,6 mm). Plus à l’est sur la côte méditerranéenne du Maghreb, il n’a pas plu une goutte à Mellila (enclave espagnole), un record en février depuis le début des mesures en 1948. Cette sécheresse suscite une grande inquiétude dans les pays du Maghreb, en particulier au Maroc fortement dépendant de son secteur agricole : même si l’irrégularité des pluies constitue une caractéristique structurelle du climat marocain, le déficit pluviométrique observé depuis plusieurs mois dans le pays affecte dangereusement ses ressources en eau, comme l’indique le niveau anormalement bas de ses barrages.

vendredi 6 mars 2020

Nouvelle poussée de fièvre au cours du dernier trimestre (déc. 2019 à fév. 2020)

Le constat est sans appel : le dernier trimestre (déc-jan-fév) 2019-2020 a été le 2e plus chaud à l’échelle mondiale, mais le plus chaud en Russie et en Europe (notamment en France, en Finlande ou encore en Pologne).


Selon le programme européen Copernicus, l’anomalie thermique à l’échelle globale atteint +0,77°C et place ce trimestre au 2e rang des plus chauds derrière celui de 2015-2016. Le mois de février 2020 en particulier a été anormalement chaud, comme le montrent les données satellitaires UAH : l’anomalie de la température dans la basse troposphère atteint +0,76°C (contre +0,57°C en janvier 2020) ; il s’agit de la 3e plus forte anomalie mensuelle depuis le début début des mesures en 1979, derrière les mois de février 2016 (+0,86°C) et mars 2016 (+0,77°C), tous deux associés à un fort épisode El Niño (contrairement à cet hiver).

À l’échelle de l’Europe et de la Russie, l’hiver météorologique 2019-2020 a été le plus doux depuis le début des mesures, loin devant l’hiver 2015-2016. Selon les données de Copernicus Climate Change Service, l’anomalie en Europe a atteint une valeur exceptionnelle de +3,39°C par rapport à la moyenne 1981-2010, pulvérisant de 1,38°C le précédent record de l’hiver 2015-2016. L’anomalie de température dépasse même les +4°C par rapport à l’ère pré-industrielle (1850-1900) ! En France, cet hiver a également été le plus chaud jamais enregistré avec une température moyenne nationale supérieure de 2,7°C à la normale saisonnière, devant l’hiver 2015-2016 (anomalie de +2,6°C).
Même constat en Russie : l’hiver 2019-2020 a été le plus chaud depuis le début des mesures en 1891, battant de 1,3°C le précédent record remontant à l’hiver 2015-2016.

jeudi 5 mars 2020

Les bienfaits inespérés des mesures contre le coronavirus sur la qualité de l’air

La NASA a publié il y a quelques jours des images montrant une baisse significative de la pollution atmosphérique en Chine, en grande partie due au ralentissement économique résultant des mesures prises pour réduire la propagation du coronavirus Covid-19 dans le pays (mesures de confinement, fermeture d’usines et d’entreprises, réduction du trafic urbain et aérien…).


Les satellites de surveillance de la pollution de la NASA et de l’Agence spatiale européenne (ESA) ont détecté notamment des baisses significatives de dioxyde d’azote (NO2), un gaz nocif émis par les véhicules à moteur, les centrales thermiques et les installations industrielles. La baisse de concentration de dioxyde d’azote (NO2) a d’abord été remarquée près de Wuhan, l’épicentre de l’épidémie, puis s’est peu à peu étendue à d’autres régions chinoises. Les cartes comparant les concentrations de NO2 dans la moitié est de la Chine montrent ainsi une forte baisse entre la période du 1er au 20 janvier 2020, avant les mesures de quarantaine imposées à Wuhan puis à d’autres villes de Chine, et la période du 10 au 25 février 2020.

La Nasa précise toutefois que la pollution de l’air diminue généralement au moment de la célébration du Nouvel An chinois, c’est-à-dire entre fin janvier et début février lorsque les entreprises et les usines ferment à l’occasion de cette fête traditionnelle. Mais on observe habituellement un retour “à la normale” dès la fin des festivités, ce qui n’a pas été le cas cette année, comme le révèlent les concentrations de NO2 relevées dans la région de Wuhan entre 2019 et 2020 sur les trois périodes de référence allant du 1er au 20 janvier (avant le Nouvel An lunaire), du 28 janvier au 9 février (autour des célébrations du Nouvel An), et du 10 au 25 février (après l’événement).

Comme le souligne la NASA, c’est la première fois que l’on observe une chute aussi spectaculaire des concentrations de NO2 sur une zone aussi étendue pour un événement spécifique. La baisse atteint jusqu’à 30 % par rapport à la moyenne pour cette période de l’année calculée depuis le début des mesures en 2005. La récession économique mondiale en 2008 avait provoqué une baisse aussi significative de la pollution au NO2 dans plusieurs pays, mais la baisse avait été plus graduelle.

Par ailleurs, une étude du Centre for Research on Energy and Clean Air (Crea) basé en Finlande indique que les émissions de CO2 en Chine ont quant à elles diminué de près de 25 % par rapport à la même période de l’année précédente, représentant une diminution de 6 % des émissions mondiales sur cette même période.
Comme chaque année, au moment du Nouvel An chinois, la production d’électricité à partir du charbon diminue en effet de 50 % en moyenne durant les 10 jours qui suivent la veille du Nouvel An chinois (marqué par un zéro sur l’axe des abscisses sur la graphique du bas). Cette année (cf. courbe en rouge), la baisse habituelle de la consommation d’énergie a été prolongée de 10 jours, sans aucun signe de reprise jusqu’à présent.
À l’échelle du pays, le taux de particules fines a également fortement chuté à partir du 12 février (au-delà de la période de congés du Nouvel An chinois), passant de 139 μg/m3 ce même jour à 55 μg/m3 le 15 février, soit une baisse de 60 %.

Si l’air est à ce jour moins pollué (en dépit aussi d’un déficit pluviométrique en Chine au mois de février), rien ne garantit que cette amélioration se prolongera une fois l’épidémie terminée. Des baisses significatives de la pollution ont déjà été observées par le passé, notamment à l’échelle du pays lors de l’épidémie du SRAS en 2003 ou autour de Pékin pendant les Jeux olympiques de 2008, mais des pics de pollution ont aussitôt suivi la fin de ces événements.
On peut donc craindre que l’embellie actuelle ne soit que passagère et que les mesures de relance économique que le gouvernement chinois va prendre pour compenser ses pertes à l’issue de cette épidémie de coronavirus pourraient conduire à des pics de pollution à moyen terme…